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Comment prioriser les gestes d’électrophysiologie et comment s’organiser ?

 

Nous voici après 4 semaines de confinement et de réduction de l’activité médicale liés à l'épidémie COVID-19 en France. La priorité est de protéger les patients et le personnel, de libérer des lits et d’éviter des séjours en réanimation en cas de complication, le temps de considérer les conditions d’une reprise éventuelle d’activité progressive dans le domaine de la Rythmologie Interventionnelle.

Cette activité a été réduite à la stricte urgence selon des protocoles propres à chaque structure, et nos patients peuvent se manifester car leurs symptômes deviennent plus invalidants. Attendre plus longtemps risque de devenir problématique. Il faut tout de même continuer à assurer la protection des patients de tout risque de contamination au COVID 19. Les centres hospitaliers privés ou publics ont séparé les patients en fonction de leur état de contamination.  Il reste néanmoins difficile en l’état actuel des choses d’exclure complètement tout risque de contamination dans les secteurs non COVID du fait des formes cliniques parfois asymptomatiques de la maladie.

Dans la plupart des centres français, l’activité d’implantation de dispositifs électroniques cardiaques se limite actuellement aux stimulateurs urgents (syncopes, BAV menaçants, resynchronisations urgentes), aux défibrillateurs en prévention secondaire et aux remplacements des dispositifs arrivés en fin de vie. L’ambulatoire et les séjours courts permettent d’éviter au patient de rester inutilement hospitalisés. Le télésuivi de l’insuffisance cardiaque, la télésurveillance des dispositifs implantables (Moniteurs ECG, PM et DAI) et les téléconsultations  permettent de surveiller une cicatrice ou de rassurer un patient. Éviter que les salles d’attente soient encombrées et éviter les consultations physiques est  du domaine du possible avec ces nouvelles techniques de suivi. Il faudra tirer des leçons  de cette crise sanitaire et  développer ce type de suivi, ce qui pourra nous aider à gérer la démographie médicale menaçante.

Un guide pour adapter l’activité d’électrophysiologie pendant cette pandémie vient d’être publié dans Circulation par des représentants de HRS, ACC et AHA expliquant les risques potentiels auxquels sont exposés les patients, le personnel soignant et les supports techniques de l’industrie : 

Guidance for Cardiac Electrophysiology During the Coronavirus (COVID-19) Pandemic from the Heart Rhythm Society COVID-19 Task Force; Electrophysiology Section of the American College of Cardiology; and the Electrocardiography and Arrhythmias Committee of the Council on Clinical Cardiology, American Heart Association

L’article met en avant la limitation du contact entre les patients COVID+ et le personnel  médical, paramédical ou du support technique en salle d’électrophysiologie.

Forts des expériences en Chine et en Italie, les auteurs insistent sur le triage des patients en fonction de leur « statut COVID ». L’interrogatoire des patients (voyage, contacts et symptômes) doit permettre d’orienter vers un test rapide avant de soumettre un patient à un examen qui pourrait être à l’origine d’une contamination du personnel. L’utilisation systématique des masques chez les patients en salle d’électrophysiologie doit être la règle. Le personnel doit se protéger avec masque, gants  et protection des yeux.

Les gestes considérés urgents sont :

  • Ablation de TV non contrôlée médicalement
  • Ablation d’une tachycardie supra-ventriculaire incessante et non contrôlée
  • Ablation d’une voie accessoire responsable d’arrêt cardiaque ou de syncope
  • Reprise de sondes, de stimulateur cardiaque ou de défibrillateur présentant un dysfonctionnement
  • Remplacement d’un dispositif implantable en fin de vie
  • Implantation d’un DAI en prévention secondaire
  • Implantation d’un PM pour un trouble conductif à risque ou symptomatique
  • Extraction d’un dispositif infecté
  • Resynchronisation pour une insuffisance cardiaque non stabilisée par le traitement
  • Cardioversion électrique pour un trouble du rythme très symptomatique (avec une ETO chez les patients nécessitant une cardioversion urgente pour un trouble du rythme atrial) 

Les gestes considérés semi-urgents : (la décision est guidée par la clinique)

  • Ablation d’une TV réfractaire au traitement ou récurrente
  • Ablation d’une TSV réfractaire
  • Remplacement non urgent d’un dispositif implantable en ERI (remplacement électif) 
  • Implantation d’un DAI en prévention primaire chez des patients à très haut risque de trouble du rythme ventriculaire grave

Les gestes non-urgents :

  • Ablation d’ESV focales
  • Ablation de TSV
  • Ablation d’une FA ou d’un Flutter chez des patients stables sans risque d’insuffisance cardiaque potentielle qui pourrait entrainer une hospitalisation
  • Exploration électrophysiologique diagnostique
  • Implantation d’un DAI en prévention primaire (en dehors des situations semi-urgentes)
  • Resynchronisation chez les patients stables
  • Upgrade des dispositifs implantables chez des patients stables 
  • Implantation d’un PM chez des patients peu symptomatiques (dysfonction sinusale dans le cadre d’une maladie de l’oreillette ou BAV I ou II non menaçant)
  • Remplacement d’un stimulateur cardiaque avec une longévité résiduelle supérieure à 6 semaines
  • Extraction des dispositifs non infectés sauf indication fonctionnelle
  • Cardioversion pour un trouble du rythme stable
  • Occlusion de l’auricule gauche si l’anticoagulation est encore possible
  • ETO pour occlusion de l’auricule gauche, ou cardioversion qui peut être réalisée après une anticoagulation d’une durée suffisante.
  • Implantation d’un moniteur ECG
  • Tilt-test

Le reste du document revient sur l’organisation des salles et des équipes qui sont les organisations actuellement préconisées dans les différents centres ainsi que l’utilisation au maximum de la télémédecine comme suggérée ci-dessus. Ainsi les consultations physiques devraient-elles être limitées à :

  • Anomalie lors du suivi par télécardiologie du dispositif implantable
  • Choc induit par le DAI, lipothymie ou syncope en rapport avec un dysfonctionnement du dispositif implanté ou un événement arythmique
  • Évaluation de symptômes suspects chez des patients ne pouvant pas être suivis par télécardiologie
  • Nécessité de reprogrammer un dispositif implantable
  • IRM (lorsqu’il n’y a pas d’autre alternative) nécessitant une programmation du dispositif
  • Patients admis aux urgences et nécessitant une vérification de leur dispositif implantable.

Un paragraphe est également dédié aux risques rythmiques chez les patients COVID et en particulier en cas d’utilisation de l’hydroxychloroquine. Ce domaine particulier fait aussi l’objet d'informations de la part de la SFC.

J. Mansourati,  J. Taieb, L. Fauchier
 

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