La newsletter du Collège des Paramédicaux de mai 2021 porte sur cette étape primordiale dans la prise en charge de nos patients cardiaques qu'est la réadaptation cardiaque.
La réadaptation cardiaque est définie par l’OMS comme : « l’ensemble des activités nécessaires pour influencer favorablement le processus évolutif de la maladie et pour assurer aux patients cardiaques une condition physique, mentale et sociale optimale, leur permettant de préserver ou reprendre par leurs moyens propres, une place aussi normale que possible dans la société ».
C’est une étape primordiale dans la prise en charge de nos patients cardiaques et malheureusement aujourd’hui encore insuffisamment prescrite en sortie d’Hospitalisation.
Seul un patient sur deux participe à un programme de réadaptation cardiovasculaire en Europe après un infarctus du myocarde. Quant à L'insuffisance cardiaque, elle a longtemps été considérée comme une contre-indication à la réadaptation cardiovasculaire. Au contraire il est admis aujourd'hui qu'elle est très bénéfique pour les patients car elle améliore considérablement leur qualité de vie. Elle augmente en particulier leur capacité fonctionnelle, leur permettant de faire plus d'effort, avec moins de symptômes.
Quels sont ses objectifs ?
À court terme : une récupération physique suffisante, un soutien psychologique pour la reprise d’une activité physique habituelle après un évènement cardiaque angoissant, l’éducation du patient et de sa famille à propos du traitement et de l’évolution de la maladie.
À long terme : la prévention des récidives et des ré-hospitalisations, la mise en œuvre d’une éducation thérapeutique pour prévenir ou traiter l’évolution de l’athérosclérose, la réinsertion socio-professionnelle, in fine l’amélioration de la qualité de la vie.
Elle se débute finalement dès l’hospitalisation et continue toute la vie afin de conserver les bénéfices acquis.
Quelles sont ses principales indications :
Maladies coronaires : SCA stabilisé, après ATL programmé, angor stable.
Post-Chirurgie cardiaque : pontages, chirurgie valvulaire, chirurgie de l’aorte thoracique, préopératoire.
Insuffisance cardiaque : dysfonction systolique VG, fonction systolique préservée, resynchronisation cardiaque, assistance ventriculaire, transplantation cardiaque.
Artériopathies des membres inférieurs.
Comment se compose-t-elle ?
Elle comporte plusieurs volets structurant le séjour du malade avec :
- Le réentrainement à l’effort guidé par une épreuve d’effort maximale et apprentissage des activités d’entretien physique à poursuivre ;
- La correction des facteurs de risques : modification des comportements alimentaires, gestion du stress, promotion de l’activité physique ;
- L’optimisation du traitement : adaptée à l’état du patient et à son mode de vie ;
- L’éducation thérapeutique : pluridisciplinaire, donne au patient les moyens d’améliorer son pronostic ;
- Une prise en charge psychologique : les répercussions psychologiques sont fréquentes : peur rétroactive de l’accident, perte de l’estime de soi, appréhension de la vie quotidienne, syndrome dépressif, perte de confiance ;
- La préparation de la réinsertion professionnelle : apprécier avec le patient les limitations à l’effort pour évaluer le moment de la reprise du travail, est-il envisageable ou non de reprendre le même poste ?
- L’ajustement du traitement aux besoins personnels.
Quelle équipe autour des patients ?
La réadaptation consiste en une approche systémique du patient, prenant en compte la personne dans sa globalité et nécessitant un réseau multidisciplinaire. Elle nécessite :
- des compétences médicales (cardiologue, médecin de médecine physique et réadaptation, diabétologue, psychiatre, tabacologue) ;
- une équipe pluridisciplinaire (IDE, MKDE, ergothérapeute, EAPA, psychologue, diététicien, aide-soignant).
Pour tout le personnel, une formation impérative aux gestes d’urgences et à la RCV est nécessaire. Une convention de transfert vers une unité de soins intensifs est prévue pour une prise en charge rapide si besoin.
En centre, le patient bénéficie de la disponibilité de l’équipe soignante et de réadaptation. Il peut se remettre en question, puis évoluer vers un éventuel changement de comportement. En cela, un entretien de motivation peut l’aider. De plus, l’effet de groupe peut lui apporter une nouvelle motivation. Il peut échanger avec les autres patients sur l’expérience de la maladie cardiaque.
Quels sont les bénéfices attendus ?
En termes de mortalité : tout gain de 1 MET (mesure de l’intensité d’une activité physique et la dépense énergétique) s’accompagne d’une diminution de la mortalité de 15 %.
En termes de ventilation : diminution de la fréquence respiratoire, augmentation du volume courant, diminution de la ventilation minute.
En termes de musculation : amélioration du métabolisme musculaire
En termes cardiovasculaires : diminution de la FC, amélioration du débit cardiaque, amélioration de la vitesse de relaxation.
Avant réadaptation cardiaque, il est toujours important de faire :
- Une évaluation initiale : interrogatoire et examen physique, ECG de repos, échocardiographie cardiaque transthoracique, épreuve d’effort ;
- Une évaluation à l’effort : doit être maximale si possible, ou limitée à une fréquence maximale (patients porteurs de DAI), à une TA systolique maximale (dissection aortique ou anévrysme aortique) ou en cas de symptômes.
En conclusion
En conclusion si l’efficacité de la réadaptation associée à une prise en charge globale et personnalisée des pathologies cardiovasculaires est aujourd’hui bien démontrée, cette méthode est hélas largement sous utilisée. On estime que seulement 25 à 30 % des patients pouvant en bénéficier sont dirigés vers un centre de réadaptation.
Des méta-analyses ont montré l’efficacité de la prise en charge à domicile des patients de RCV à faible risque. La télémédecine pourrait faciliter ce genre de suivi. Il est démontré qu’un entraînement physique bien conduit, prolongé, adapté, réduit ou supprime les symptômes de la cardiopathie, améliore l’aptitude à l’effort et la qualité de vie, tout en freinant l’évolution de l’athérosclérose coronaire ou de l’insuffisance cardiaque. Après un évènement coronarien aigu une grande importance doit être accordée à la réadaptation, à la prévention secondaire et à l’éducation des patients pour maintenir les bénéfices des traitements actuels.
Régis Barbet, kinésithérapeute. DU Réadaptation Cardiaque 2010
Vice-Président du groupe des paramédicaux de la SFC
Membre invité paramédical du bureau du GERS-P
Membre du comité scientifique du Forum Européen Cœur Exercice et Prévention