I. Diagnostic phénotypique
II. Éliminer une cause d'hyperlipidémie secondaire
III. Diagnostic des hyperlipidémies primitives
IV. Évaluation du risque cardiovasculaire global
V. Prise en charge thérapeutique

Situations de départ


19 Découverte d'un souffle vasculaire.
42 Hypertension artérielle.
69 Claudication intermittente d'un membre.
161 Douleur thoracique.
162 Dyspnée.
165 Palpitations.
195 Analyse d'un bilan lipidique.
252 Prescription d'un hypolipémiant.
285 Consultation de suivi et éducation thérapeutique d'un patient avec un antécédent cardiovasculaire.
320 Prévention des maladies cardiovasculaires.
328 Annonce d'une maladie chronique.
354 Évaluation de l'observance thérapeutique.

Hiérarchisation des connaissances


 Rang Rubrique Intitulé Descriptif
lettre a Définition Connaître l'évaluation du risque cardiovasculaire global
lettre a Définition Connaître les trois grands types de dyslipidémies Hypercholestérolémie pure, hypertriglycéridémie pure, hyperlipidémie mixte
lettre b Physiopathologie Connaître les relations entre dyslipidémies et athérosclérose
lettre a Dépistage Savoir quand dépister une dyslipidémie
lettre a Diagnostic positif Connaître le diagnostic positif et la classification des dyslipidémies  Exploration d'une anomalie lipidique, valeurs seuils, classification simplifiée
lettre a Contenu multimédia Connaître les manifestations cliniques des dyslipidémies : xanthélasma*
lettre a Étiologies Connaître les principales causes d'hyperlipidémies secondaires  Endocrinopathies, maladies rénales, atteintes hépatiques, médicaments
lettre b Examens complémentaires Savoir quel bilan biologique faire à la recherche d'une dyslipidémie secondaire
lettre a Prise en charge Connaître les principes du traitement des dyslipidémies (cf. item 330)
lettre a Prise en charge Connaître les règles hygiénodiététiques Recommandations diététiques adaptées en cas de dyslipidémie

lettre a Les risques médicaux associés aux dyslipidémies sont essentiellement le risque de maladie cardiovasculaire athéromateuse quelle que soit la localisation. Le risque est associé :
•    positivement, et de façon graduelle, à la concentration de LDL-cholestérol ;
•    négativement, et de façon graduelle, à la concentration de HDL-cholestérol ;
•    à l'hypertriglycéridémie (HTG) de façon en grande partie « dépendante » des autres marqueurs ou facteurs de risque, généralement associés à l'hypertriglycéridémie. Ces facteurs sont habituellement le surpoids, le diabète et l'HDL-cholestérol bas.
Les autres risques sont beaucoup plus rares à envisager : surtout le risque de pancréatite aiguë en cas d'hypertriglycéridémie supérieure à 10 g/L.

I Diagnostic phénotypique


La réalisation d'un bilan lipidique est conseillée chez tous les adultes. Sans anomalie, il n'est pas nécessaire de le recontrôler avant 5 ans. Le bilan lipidique (phénotype) d'un sujet à un moment donné représente une situation instantanée, qui peut varier notamment en fonction des facteurs environnementaux (principalement l'alimentation et le statut pondéral). Le phénotype ne préjuge pas nécessairement du génotype ni du mécanisme physiopathologique sous-jacent. Un génotype donné peut parfois s'exprimer chez un même sujet sous forme de plusieurs phénotypes en fonction des circonstances et notamment l'alimentation.
Le bilan lipidique usuel consiste en l'exploration d'une anomalie lipidique (EAL) comportant les dosages du cholestérol total (CT), du HDL-cholestérol et des triglycérides (TG), à partir desquels la concentration de LDL-cholestérol est calculée par la formule de Friedewald, soit : LDL ‐ C = CT – HDL - C – TG (g / L) / 5 ou TG / 2,2 (mmol  / L)
Cette formule n'est valable que pour des TG inférieurs à 3,5 g/L.
Bien que le risque associé au LDL - C et au HDL - C soit graduel, les recommandations Afssaps (2005) considèrent que le bilan lipidique est normal si les valeurs suivantes sont présentes simultanément chez un sujet sans autre facteur de risque :
•    LDL - C < 1,6 g/L ;
•    HDL - C > 0,4 g/L ;
•    TG < 1,5 g/L.
La classification ancienne de Fredrickson (types I, IIa, IIb, III, IV, V) est une classification biochimique qui est de moins en moins utilisée dans la pratique clinique, au profit d'une classification pragmatique en trois types :
•    hypercholestérolémie pure (HCH) (ex-type IIa) : LDL - C > 1,60 g/L ;
•    hypertriglycéridémie pure (essentiellement type IV : TG > 1,5 g/L) ;
•    hyperlipidémie mixte (HLM) : association d'une hypercholestérolémie et d'une hypertriglycéridémie (essentiellement type IIb, très rarement type III).
L'hypo-HDLémie (< 0,40 g/L chez l'homme, < 0,50 g/L chez la femme) peut être associée à l'une ou l'autre des catégories précédentes.

lettre c  Les coefficients de conversion entre g/L et mmol/L sont les suivants :
•    cholestérol :
–    g/L × 2,58 = mmol/L,
–    mmol/L × 0,387 = g/L ;
•    triglycérides :
–    g/L × 1,14 = mmol/L,
–    mmol/L × 0,875 = g/L.

 

II Éliminer une cause d'hyperlipidémie secondaire


Le tableau 3.1 résume les principales étiologies d'hyperlipidémies secondaires, l'outil diagnostique usuel pour les rechercher et le type d'hyperlipidémie le plus souvent associé à ces étiologies.

Tableau 3.1  lettre a Hyperlipidémies secondaires.

Étiologies Moyen diagnostique Type d'hyperlipidémie
Hypothyroïdie TSH  HCH/HLM
Cholestase  Bilirubine, phosphatase alcaline   HCH
Syndrome néphrotique     Protéinurie, œdèmes     HLM
Insuffisance rénale chronique        Créatinine  HTG/HLM
Alcoolisme        Interrogatoire  HTG
Diabète Glycémie, HbA1c HTG
Hyperlipidémie iatrogène     Interrogatoire      
Œstrogènes         " HTG
Corticoïdes   " HLM/HTG
Rétinoïdes " HTG
Antirétroviraux " HTG
Ciclosporine " HCH/HLM
Diurétiques, bêtabloquants    "     " HTG modérée

HbA1c : hémoglobine glyquée ; HCH : hypercholestérolémie ; HLM : hyperlipidémie mixte ; HTG : hypertriglycéridémie.

III Diagnostic des hyperlipidémies primitives


Pour des raisons didactiques, on présente ici une classification génotypique des dyslipidémies primitives. Dans la pratique, les modalités d'expression phénotypique (bilan lipidique) présentent d'importantes zones de chevauchement entre divers types de dyslipidémies génétiques. Aussi, le diagnostic génotypique n'est-il pas toujours facile à poser avec certitude en dehors d'investigations génétiques (qui ne sont pas souvent nécessaires pour la prise en charge thérapeutique).

A Hypercholestérolémies familiales monogéniques

1 Par mutation du gène du LDL-récepteur (cause la plus fréquente)
lettre b Les caractéristiques comparées des formes hétérozygote et homozygote sont présentées dans le tableau 3.2.

Tableau 3.2 lettre b Caractéristiques des hypercholestérolémies familiales par mutation du gène du LDL-récepteur (LDL-R).

Forme hétérozygote Forme homozygote
50 % des récepteurs aux LDL touchés, 50 % fonctionnels ≈ 100 % des récepteurs LDL atteints
Fréquente (1/500 dans la population), 80 % de mutations retrouvées Exceptionnelle (1/1 000 000 dans la population)
Élévation importante du LDL-C : entre 2 et 4 g/L Élévation majeure du LDL-C : > 5 g/L
Dépôts lipidiques caractéristiques (inconstants) : xanthomes tendineux, arc cornéen prématuré Dépôts lipidiques xanthomateux présents dès l'enfance
Risque cardiovasculaire élevé  Complications athéromateuses (y compris rétrécissement aortique) pouvant survenir dès la 1re décennie

LDL : Low Density Lipoprotein.

2 Liée à une mutation du gène de l'apolipoprotéine B (apoB) (rare)
•    Il s'agit d'une mutation de l'apoB entraînant une moindre affinité des LDL pour le LDL-R.
•    L'expression de l'hypercholestérolémie est plus modérée avec LDL-C classiquement entre 2 et 3 g/L.
•    Les xanthomes sont rares.

3 Liée à une mutation du gène de la protéine PCSK9 (très rare)
•    Il s'agit d'une mutation « gain de fonction » entraînant une augmentation de l'affinité de PCSK9 pour le LDL-R.
•    De ce fait, le LDL-R est dégradé après internalisation des LDL, et ne peut plus être réutilisé.

B Hypercholestérolémies polygéniques
•    lettre a Il s'agit d'hyperlipidémies très fréquentes avec LDL-C entre 1,3 et 2,5 g/L le plus souvent ; une HTG est parfois associée.
•    Il existe une prédisposition familiale polygénique.
•    La physiopathologie fait probablement intervenir plusieurs mécanismes.
•    Les hypercholestérolémies polygéniques sont souvent assez sensibles à l'alimentation.
•    Le risque cardiovasculaire est modulé par le niveau de l'hypercholestérolémie et la présence des autres facteurs de risque.

C Hyperlipidémie familiale combinée
•    Elle est fréquente et concerne 1 à 2 % de la population.
•    Le caractère polygénique est probable.
•    Elle peut s'exprimer avec des phénotypes lipidiques variables dans la famille, et parfois chez un même individu (en fonction du poids et de l'alimentation) : hyperlipidémie mixte, hypercholestérolémie ou hypertriglycéridémie pures.
•    Dans l'expression la plus fréquente (hyperlipidémie mixte modérée), le cholestérol total varie typiquement entre 2,5 et 3,5 g/L (LDL-C entre 1,6 et 2,5 g/L) et les triglycérides entre 1,5 et 5 g/L.
•    Le risque cardiovasculaire dépend du niveau de l'hyperlipidémie et des autres facteurs de risque associés.

D Dysbêtalipoprotéinémie (ex-type III)
•    lettre b Elle est rare, avec une fréquence d'environ 1/10 000 à 1/5 000.
•    Deux conditions sont nécessaires pour l'expression d'une dysbêtalipoprotéinémie :

–    prédisposition génétique nécessaire : isoforme E2 de l'apolipoprotéine E à l'état homozygote E2/E2 ;
–    + un autre facteur : surpoids, diabète, hypothyroïdie, certains traitements.
•    Le taux de cholestérol est de 3–6 g/L et celui des triglycérides de 4–10 g/L ; le lipidogramme (accumulation des IDL – Intermediate Density Lipoproteins) et le typage de l'apoE sont pertinents.
•    Des xanthomes plans palmaires et xanthomes tubéreux jaune orangé sont caractéristiques mais rares.
•    Le risque cardiovasculaire est élevé.
•    Le traitement repose sur la diététique ; les fibrates sont souvent aussi efficaces que les statines dans cette forme.

E Hypertriglycéridémie familiale (ex-type IV)
•    lettre a Elle est assez fréquente.
•    Il s'agit d'une hypertriglycéridémie pure (type IV) chez le sujet et les apparentés atteints.
•    Les diagnostics différentiels sont l'hypertriglycéridémie dépendante de l'alimentation et l'hyperlipidémie familiale combinée (s'exprimant parfois sous forme d'une HTG).
•    Il existe une grande variabilité du niveau de TG, dépendant du surpoids, de l'alcool et des sucres.
•    lettre b Une chylomicronémie peut être associée (type V) en cas de poussée majeure d'HTG.
•    lettre a Le risque athérogène est incertain.

F Hyperchylomicronémies primitives (ex-types I et V)
•    lettre b Elles sont très rares.
•    Elles sont caractérisées par une HTG majeure > 10 g/L, pouvant aller jusqu'à 100 g/L.
•    Il s'agit d'un type I en cas d'hyperchylomicronémie pure (enfant), d'un type V en cas d'élévation associée des chylomicrons et des VLDL (Very Low Density Lipoproteins).
•    Une mutation génétique sous-jacente en est à l'origine.
•    Il existe un risque majeur de pancréatite aiguë.

IV Évaluation du risque cardiovasculaire global


lettre a L'European Society of Cardiology (2019) recommande d'évaluer le risque cardiovasculaire en prévention primaire à l'aide de l'outil SCORE (Systematic Coronary Risk Estimation). Celui-ci évalue le risque de mortalité cardiovasculaire à 10 ans, en fonction du sexe, de l'âge (de 40 à 65 ans), du statut tabagique, de la pression artérielle systolique et des concentrations de cholestérol total.
Cet outil n'était pas adapté dans les cas suivants :
•    hypertension sévère (PA ≥ 180/110 mmHg), diabète, insuffisance rénale chronique ou hypercholestérolémie familiale. Dans ces cas, le risque est d'emblée considéré comme élevé ou très élevé (cf. tableau 2.2).
•    en cas de maladie cardiovasculaire documentée, en prévention secondaire, le risque cardiovasculaire est d'emblée considéré très élevé.
Quatre catégories de risque étaient ainsi définies (cf. tableau 2.2). En fonction de la catégorie de risque pour un patient, sont définis un objectif cible pour le LDL-cholestérol (cf. tableau 3.3) et les modalités thérapeutiques proposées (cf. tableau 3.4).

lettre b En 2021, les recommandations européennes pour l'évaluation du risque cardiovasculaire ont été modifiées en prenant en compte non pas seulement le risque de décès par maladie cardiovasculaire à 10 ans mais également la morbidité liée aux MCV (infarctus du myocarde non fatal, accident vasculaire cérébral non fatal) combinée à la mortalité due aux MCV qui reflète mieux la charge totale des pathologies cardiovasculaires. Un score actualisé est proposé – SCORE2 – qui estime le risque sur 10 ans d'événements mortels et non mortels (infarctus du myocarde, accident vasculaire cérébral) chez les personnes âgées de 40 à 69 ans, apparemment en bonne santé, présentant des facteurs de risque non traités ou stables depuis longtemps (cf. item 222 – chapitre 2) ainsi qu'un SCORE OP pour les personnes âgées de plus de 70 ans.

Tableau 3.3 lettre alettre b Objectif pour le LDL-C selon les catégories de risque cardiovasculaire et seuils d'introduction des conseils de mode de vie et de traitement médicamenteux.

Prévention Risque Objectif LDL-C Conseils mode de vie et traitement médicamenteux si non contrôlé Conseils mode de vie + traitement médicamenteux1
Primaire Faible < 3 mmol/L 3–4,9 mmol/L ≥ 4,9 mmol/L
< 1,16 g/L 1,15–1,9 g/L ≥ 1,9 g/L
Modéré < 2,6 mmol/L 2,6–4,9 mmol/L ≥ 4,9 mmol/L
< 1 g/L 1–1,9 g/L ≥ 1,9 g/L
Élevé < 1,8 mmol/L 1,8–2,6 mmol/L ≥ 2,6 mmol/L
< 0,70 g/L 0,70–1 g/L ≥ 1 g/L
Très élevé < 1,4 mmol/L 1,4–1,8 mmol/L ≥ 1,8 mmol/L
< 0,55 g/L 0,55–0,70 g/L ≥ 0,70 g/L
Secondaire Très élevé < 1,4 mmol/L   ≥ 1,4 mmol/L
< 0,55 g/L   ≥ 0,55 g/L

1Nécessité de traitement médicamenteux : au-delà de ce seuil, le traitement médicamenteux est justifié d'emblée en association aux conseils de mode de vie.
© Mach F, Baigent C, Catapano AL, Koskinas KC, Casula M, Badimon L, et al. ; ESC Scientific Document Group. 2019 ESC/EAS Guidelines for the management of dyslipidaemias : lipid modification to reduce cardiovascular risk. Eur Heart J. 2020 ; 41 (1) : 111–88.
in Médecine cardiovasculaire, les Référentiels des Collèges, CNEC, SFC, 2022, 2e édition, Elsevier Masson 

Tableau 3.4. lettre b Stratégies d'intervention en fonction du LDL-C dans les différentes catégories de risque cardiovasculaire.

LDL-C < 1,4 mmol/L 1,4–1,8 mmol/L 1,8–2,6 mmol/L 2,6–3,0 mmol/L 3,0–4,9 mmol/L  ≥ 4,9 mmol/L
  < 0,55 g/L 0,55–0,70 g/L 0,70–1 g/L 1–1,16 g/L 1,15–1,9 g/L ≥ 1,9 g/L
Prévention primaire
Bas risque Conseils mode de vie Conseils mode de vie et traitement médicamenteux si non contrôlé Conseils mode de vie et traitement médicamenteux si non contrôlé
Risque modéré Conseils mode de vie  Conseils mode de vie et traitement médicamenteux si non contrôlé   Conseils mode de vie + traitement médicamenteux
Risque élevé Conseils mode de vie  Conseils mode de vie et traitement médicamenteux si non contrôlé Conseils mode de vie + traitement médicamenteux
Risque très élevé Conseils mode de vie Conseils mode de vie et traitement médicamenteux si non contrôlé  Conseils mode de vie + traitement médicamenteux
Prévention secondaire
Risque très élevé Conseils mode de vie et traitement médicamenteux si non contrôlé Conseils mode de vie + traitement médicamenteux

© Mach F, Baigent C, Catapano AL, Koskinas KC, Casula M, Badimon L, et al. ; ESC Scientific Document Group. 2019 ESC/EAS Guidelines for the management of dyslipidaemias : lipid modification to reduce cardiovascular risk. Eur Heart J. 2020 ; 41 (1) : 111–88.
in Médecine cardiovasculaire, les Référentiels des Collèges, CNEC, SFC, 2022, 2e édition, Elsevier Masson 

V Prise en charge thérapeutique


L'objectif cible pour le LDL-C est fonction du risque cardiovasculaire (cf. tableau 3.3). Pour atteindre ces objectifs, l'ESC recommande (cf. tableau 3.4) :
•    de toujours donner des conseils de mode de vie ;
•    d'envisager un traitement médicamenteux si le LDL-C reste supérieur à l'objectif en fonction de la catégorie de risque ;
•    d'associer certainement un traitement médicamenteux si le LDL-C reste nettement supérieur à l'objectif en fonction de la catégorie de risque ;
•    d'associer d'emblée un traitement médicamenteux si le LDL-C reste supérieur à l'objectif en situation de prévention secondaire

A Objectifs thérapeutiques

•    Le LDL-C demeure actuellement le principal objectif thérapeutique car les preuves de bénéfice cardiovasculaire reposent sur son abaissement. Des objectifs thérapeutiques sont proposés pour le LDL-C pour les 4 catégories de risque (cf. tableau 3.3).
•    Ces objectifs thérapeutiques ne s'appliquent pas à l'hypercholestérolémie familiale dont le risque cardiovasculaire est élevé (cf. D. Prise en charge thérapeutique de l'hypercholestérolémie familiale hétérozygote).

B Traitement diététique

Il est toujours indiqué en présence de toute anomalie lipidique et de tout facteur de risque. Le traitement médicamenteux peut être débuté après 3 mois si le contrôle de LDL-C reste éloigné de l'objectif, ou d'emblée si le LDL-C est très supérieur à l'objectif, en particulier en prévention secondaire (cf. tableau 3.4)
Dans tous les cas, le traitement diététique est poursuivi au long cours.
Les modifications du régime alimentaire comprennent les mesures suivantes :
•    limitation de l'apport en acides gras saturés (graisses d'origine animale) < 10–12 % des calories, au profit des acides gras mono ou poly-insaturés ;
•    suppression des acides gras trans (acides gras « partiellement hydrogénés ») ;
•    augmentation de la consommation en acides gras poly-insaturés oméga-3 (poissons) ;
•    augmentation de la consommation de fibres présentes dans les fruits, légumes et céréales complètes ;
•    limitation modérée du cholestérol alimentaire : on ne supprime pas les œufs, on propose de les limiter à 3/semaine environ ;
•    lettre b utilisation d'aliments enrichis en stérols végétaux discutée.
lettre a En outre, il est recommandé de mettre en place une diététique de type méditerranéen, en raison de son bénéfice cardiovasculaire, comportant consommation d'huile d'olive, apport important de fruits et légumes (5 portions/j), ainsi que de fruits à coque (noix, noisettes, amandes : 30 g/j).
À ces recommandations, s'ajoute la nécessité de limiter la consommation d'alcool (en particulier pour les triglycérides), de contrôler le poids et de corriger la sédentarité.
Les mesures diététiques spécifiques aux hypertriglycéridémies sont les suivantes :
•    pour toutes les hypertriglycéridémies modérées sans hyperchylomicronémie, les trois facteurs importants à considérer sont :
–    réduction pondérale en cas d'excès (notamment excès d'adiposité abdominale),
–    réduction de l'alcool,
–    réduction des sucres ;
•    Ces mesures nutritionnelles constituent l'essentiel du traitement des hypertriglycéridémies modérées, les traitements médicamenteux ayant qu'un impact mineur dans ce cadre ;
•    Les hypertriglycéridémies majeures (> 10 g/L) avec hyperchylomicronémie constituent des cas particuliers :
–    avis spécialisé nécessaire pour affirmer le diagnostic et les orientations thérapeutiques notamment sur le plan nutritionnel,
–    réduction nécessaire de l'apport lipidique << 30 g/j.

C Traitement médicamenteux

1 Principes généraux
•    En prévention primaire, l'introduction du traitement ne se fait habituellement qu'après au moins 3 mois de traitement diététique bien suivi et contrôlé. Les posologies initiales sont faibles ou modérées et l'adaptation posologique peut se faire progressivement pour atteindre l'objectif thérapeutique (cf. tableau 3.3).
•    En cas de risque très élevé, le traitement médicamenteux est en général indiqué d'emblée (toujours surtout en contexte de prévention secondaire), en association au traitement diététique, en utilisant souvent des posologies fortes cherchant à abaisser le LDL-C de plus de 50 %.
•    Les statines sont contre-indiquées en cas de grossesse.

2 Hypercholestérolémies pures et hyperlipidémies mixtes
•    En premier choix, on utilise une statine (bénéfice cardiovasculaire le mieux démontré). Les molécules les plus anciennes sont la simvastatine et la pravastatine, les plus récentes l'atorvastatine et la rosuvastatine.
•    En cas d'objectif non atteint, il est recommandé d'intensifier le schéma thérapeutique (augmentation jusqu'à la dose maximale tolérée, substitution par une statine plus puissante).
•    Si l'objectif cible n'est pas atteint avec la dose maximale tolérée de statine, une association d'une statine avec l'ézétimibe (Ezetrol®) est recommandée, ou en dernier lieu une association avec la colestyramine (Questran®).
•    En second choix (intolérance aux statines), on utilise l'ézétimibe, voire la colestyramine, rarement les fibrates.

3 Hypertriglycéridémies pures
•    Si le taux de TG est compris entre 1,5 et 5 g/L, on préconise un traitement diététique seul.
•    Si le taux de TG est > 5 g/L malgré une diététique bien suivie : parallèlement au traitement diététique, un traitement médicamenteux peut être instauré par fibrate, éventuellement associé à des AGPI (acides gras poly-insaturés) n-3 à forte posologie (formulation pas encore commercialisée en France en 2021).

D Prise en charge thérapeutique de l'hypercholestérolémie familiale hétérozygote
•    Le dépistage en cascade (recherche de la maladie chez les apparentés d'un patient) de l'hypercholestérolémie familiale est recommandé chez les apparentés du 1er degré de patients avec hypercholestérolémie familiale diagnostiquée.
•    Les objectifs thérapeutiques chez les patients jusqu'à 20 ans visent un taux de LDL-C < 1,3 g/L (3,4 mmol/L).
•    Au-delà de 20 ans, les objectifs thérapeutiques sont ceux préconisés chez les patients à risque CV élevé, très élevé ou en prévention secondaire selon la catégorie de risque du sujet avec hypercholestérolémie familiale (cf. tableau 2.2 et tableau 3.3).
•    Le traitement est identique à celui de l'hypercholestérolémie isolée. En cas de résistance au traitement, il est recommandé de solliciter un avis spécialisé.

E Anticorps anti-PCSK9
lettre b Deux anticorps anti-PCSK9 sont disponibles, l'alirocumab (Praluent®) et l'évolocumab (Repatha®), qui sont des immunoglobulines monoclonales humaines injectables (sous-cutanée) diminuant les taux sanguins de LDL-cholestérol de 50 % en plus de la baisse déjà obtenue avec un traitement par statines et réduisant les événements cardiovasculaires dans des essais randomisés contre placebo.
En raison du coût élevé des traitements, leur remboursement nécessite en France un accord préalable de l'assurance maladie dans l'indication suivante chez l'adulte :
•    en prévention secondaire d'une maladie cardiovasculaire avérée ;
•    chez des patients dont le LDL-C reste > 0,7 g/L malgré un traitement hypolipémiant optimisé comprenant au moins une statine à la dose maximale tolérée (qui doit être poursuivi).

F Surveillance du traitement hypolipémiant
•    lettre a L'efficacité est évaluée par un bilan lipidique dans un délai de 12 semaines après avoir instauré la prise en charge. Par la suite, un bilan lipidique est recommandé 8 à 12 semaines après chaque adaptation du traitement, jusqu'à obtention des valeurs cibles.
•    L'effet secondaire le plus fréquent des hypolipémiants, en particulier des statines, est la survenue de myalgies. La surveillance musculaire est essentiellement clinique. On ne réalise pas de dosage systématique des CPK (créatine-phosphokinases) sauf dans les situations à risque suivantes : douleurs musculaires, insuffisance rénale modérée à sévère, hypothyroïdie, antécédents personnels ou familiaux de maladie musculaire génétique, abus d'alcool, âge > 70 ans. L'arrêt des statines est recommandé pour des valeurs de CPK > 5 N (à distance d'une activité sportive).
•    La surveillance hépatique est instaurée avant le traitement, 8–12 semaines après le début du traitement médicamenteux ou après toute augmentation de la posologie, puis tous les ans en cas d'ALAT (alanine-aminotransférase) < 3 N. En cas d'ALAT > 3 N, on doit arrêter la statine ou réduire la posologie, contrôler les enzymes hépatiques après 4 à 6 semaines.

Points-clés


•    Le risque de maladie cardiovasculaire athéromateuse, quelle que soit la localisation, est associé positivement au taux de LDL-cholestérol et négativement au taux d'HDL-cholestérol. Le risque associé à l'HTG est en grande partie dépendant des autres marqueurs ou facteurs de risque associés.
•    Il existe un risque de pancréatite aiguë en cas d'HTG > 10 g/L.
•    L'EAL doit comporter les mesures du CT, du HDL-C, des TG. La formule de Friedewald est : LDL-C = CT – HDL-C – TG (g/L)/5.
•    Le bilan lipidique est normal si les valeurs suivantes sont présentes simultanément : LDL-C < 1,6 g/L, HDL-C > 0,4 g/L et TG < 1,5 g/L.
•    Les principales causes d'hyperlipidémie secondaire sont l'hypothyroïdie, la cholestase hépatique, le syndrome néphrotique, l'insuffisance rénale chronique, le diabète, l'alcoolisme, les causes iatrogènes (corticoïdes, rétinoïdes, œstrogènes, ciclosporine, antirétroviraux, diurétiques, bêtabloquants).
•    Les hypercholestérolémies familiales monogéniques (hétérozygotes surtout, exceptionnellement homozygotes) sont dues à une mutation du récepteur aux LDL, plus rarement de l'apoB. Le LDL-C se situe entre 2 et 4 g/L avant traitement.
•    Les hypercholestérolémies polygéniques sont très fréquentes, font intervenir plusieurs mécanismes, elles sont sensibles à l'alimentation, le LDL-C est souvent compris entre 1,3 et 2 g/L.
•    Les hyperlipidémies combinées sont fréquentes, l'expression usuelle est une hyperlipidémie mixte modérée : CT typiquement entre 2,5 et 3,5 g/L, LDL-C entre 1,6 et 2,5 g/L, triglycérides entre 1,5 et 5 g/L.
•    La dysbêtalipoprotéinémie, associée à l'isoforme E2 de l'apoE, et l'hyperchylomicronémie primitive, qui expose au risque de pancréatite, sont très rares.
•    Trois catégories de risque cardiovasculaire sont définies à l'aide des outils SCORE 2 et SCORE OP.
•    Les objectifs pour le LDL-C dépendent de la catégorie de risque : < 1,15 g/L pour un risque faible, < 1,0 g/L pour un risque modéré, < 0,7 g/L pour un risque élevé, < 0,55 g/L pour un risque très élevé.
•    Le traitement diététique est indiqué en présence de toute anomalie lipidique et de tout facteur de risque. Il est instauré seul pendant 3 mois en prévention primaire, associé d'emblée au traitement médicamenteux en cas de risque très élevé.
•    Les mesures diététiques générales consistent en un apport lipidique global < 35 % de l'apport énergétique total, une réduction des graisses saturées < 12 %, un apport de graisses mono-insaturées et poly-insaturées, en particulier oméga-3, un apport de cholestérol alimentaire < 300 mg/j, la consommation de 5 fruits ou légumes/j, un apport sodé < 6 g/j, une réduction pondérale.
•    Pour les hypertriglycéridémies, on associe une réduction pondérale, une réduction de l'alcool et des sucres simples.
•    En prévention primaire, après au moins 3 mois d'intervention diététique, les posologies initiales du traitement médicamenteux sont faibles ou modérées et l'adaptation posologique peut se faire progressivement pour atteindre l'objectif thérapeutique. En cas de risque très élevé, il est indiqué d'emblée en association au traitement diététique.
•    Pour les hypercholestérolémies pures et hyperlipidémies mixtes, le premier choix repose sur une statine, le deuxième choix (intolérance aux statines) sur l'ézétimibe, voire la colestyramine, rarement les fibrates.
•    Pour les hypertriglycéridémies pures, on prescrit un traitement diététique seul en cas de TG compris entre 1,5 et 5 g/L, un fibrate en cas de TG > 5 g/L malgré une diététique bien suivie.
•    L'efficacité du traitement hypolipémiant est jugée sur un bilan lipidique 2 à 3 mois après l'instauration, la tolérance est évaluée sur les myalgies sous statine, les transaminases à 3 mois, un dosage des CPK uniquement en cas de symptômes musculaires ou de situation à risque.

Notions indispensables et inacceptables


Notions indispensables
•    Importance de rechercher une cause secondaire d'hyperlipémie.
•    Connaître les objectifs de LDL-C en fonction du risque cardiovasculaire établi par les calculs de risque SCORE (SCORE-2 et SCORE-OP depuis les recommandations ESC 2021) et des autres facteurs de risque.

Notions inacceptables
•    Ne pas graduer l'intervention en fonction du niveau de risque.
•    Négliger la surveillance biologique (efficacité, transaminases) après instauration et augmentation de doses des statines.