La SFC et la SFAR ont débuté en 2008 une réflexion commune concernant la prise en charge des patients coronariens devant être opérés d’une chirurgie non cardiaque. L’originalité des recommandations issues de ce travail est qu’il reflète un dialogue de deux ans entre la SFC et la SFAR et donc la réalité d’un terrain partagé entre anesthésistes-réanimateurs et cardiologues dans la prise en charge de ces patients. Ces recommandations se distinguent en cela des différentes versions des recommandations américaines de l’ACC/AHA et à la parution récente des recommandations de l’ESC endossées par l’ESA en 2009.
Les recommandations initiales ACC/AHA de 1996 revues en 2002 proposaient des recommandations complexes à appliquer faisant une place importante aux examens non invasifs sans qu’un bénéfice de cette stratégie n’apparaisse clairement. De plus, la littérature disponible à cette époque provenait d’essais essentiellement réalisés chez des patients de chirurgie vasculaire qui représentent une population spécifique, présentant un risque particulier, dont la stratégie préopératoires ne peut pas être appliquée à toute la population de patients opérés. Depuis, la littérature a évolué, et les stratégies de stratification préopératoires se sont modifiées, faisant évoluer le concept, en réservant les examens de stress non invasifs à certains patients particulièrement a risque, en restreignant considérablement les indications de revascularisation préopératoires, et en privilégiant l’optimisation du traitement médical.
Des recommandations de l’ACC/AHA et de l’ESC/ESA concernant la prise en charge de ces patients ont donc été publiées récemment, en portant des messages légèrement différents : les recommandations européennes, qui sont très en faveur des traitements prophylactiques par bêta bloquants et statines, offrent un place particulièrement large à ces traitements prophylactiques.
Alors, pourquoi proposer des recommandations françaises alors que des recommandations européennes ou américaines existent et que celles-ci apparaissent tout à fait raisonnables ? Tout d’abord parce que c’est le rôle de nos sociétés de faire des recommandations qui sont applicables en tenant compte du contexte national (contexte économique, disponibilité des examens, habitudes de travail). Le but de ces recommandations n’est pas nécessairement de se démarquer des recommandations étrangères, mais de les reprendre en partie tout en proposant une version plus adaptée au contexte médical dans lequel nous travaillons. D’autre part, ces recommandations en français seront accompagnées d’un programme d’EPP permettant aux praticiens des deux disciplines, cardiologie et anesthésie réanimation, de mettre en pratique et d’évaluer ces recommandations dans leur pratique quotidienne. En effet, on connaît bien le décalage entre la publication de recommandations et les modifications de pratique clinique. Par rapport aux recommandations européennes et américaines, ces recommandations françaises ont la particularité d’être écrites sous la responsabilité de binômes anesthésiste-réanimateur et cardiologue et de pouvoir être appliquées par les deux disciplines, quelque soit leur mode d’exercice. En effet, le système de santé français rend obligatoire la consultation d’anesthésie préopératoire par les anesthésistes, donnant un rôle particulier aux anesthésistes, qui n’existe pas à l’étranger, en ce qui concerne l’évaluation préopératoire. Lors de ces recommandations, nous avons souhaité insister particulièrement sur la communication entre ces deux disciplines, et avons proposé des outils permettant de faciliter ces interactions.
Ces recommandations sont divisées en 4 parties :
- La partie I consacrée à la quantification du risque : caractéristiques, moyens diagnostiques et incidence des événements coronariens périopératoires et scores cliniques.
- La partie II dédiée aux examens préopératoires : VPP/VPN/Se/Sp disponibilité, coût, morbidité, description, critères de choix
- La partie III traite du traitement médical ou interventionnel : revascularisation, β-bloquants, statines, aspirine, α 2-agonistes, nitrés, Ca-bloquants, Inhibiteurs de l’enzyme de conversion
- et la partie IV qui propose une stratégie globale multidisciplinaire sous forme d’un algorithme commenté.